Goodbye, Columbus

Neil tient, un jour, les lunettes de Brenda. Sous le charme, il décide de l’appeler et commence alors leur histoire. Lui, jeune bibliothécaire juif vivant dans le quartier ouvrier de Newark. Elle, une riche étudiante.

Ainsi passa l’été. Je voyais Brenda tous les soirs : nous allions nous baigner, nous allions faire des promenades à pied, en voiture, dans la montagne, si loin et si longtemps que lorsque nous nous apprêtions à redescendre, le brouillard avait commencé à émerger des arbres et à envahir la route ; je crispais mes mains sur le volant et Brenda mettait ses lunettes pour surveiller la ligne blanche. Et nous mangions – quelques nuits après après ma découverte du réfrigérateur à fruits, Brenda m’y mena elle-même. Nous remplissions d’énormes soupières de cerises, et dans les plats à rôti nous empilions des tranches de pastèques. Puis nous remontions, passions par la porte du sous-sol qui donne sur l’arrière de la maison, allions nous asseoir sur la pelouse sous l’arbre à sports, à la lumière qui filtrait des fenêtres du salon. Pendant un moment, le seul bruit était celui que nous faisions en crachant les noyaux.  » Je voudrais bien qu’ils prennent racine dans la nuit et qu’au matin il y ait des cerises et des pastèques. »

Ce court roman est l’amour d’un été. Cela commence par le coup de foudre, se poursuit par la passion et la tendresse de la découverte avant d’affronter la rentrée, moment où les cartes sont rebattues. La jeunesse, la maladresse, les idées préconçues (sociales et sentimentales) se confrontent et c’est un profond attachement qui relie le lecteur au jeune couple. A cette histoire, Philip Roth ajoute d’autres niveaux. D’abord, il y a une rencontre sociale provoquant immédiatement la peur de chaque côté. La famille de Neil, notamment sa tante, subit un déclassement violent. La famille de Brenda cache son véritable point de vue tant que cette histoire n’est pas trop sérieuse. Se pose alors la question de famille. Même si les jeunes gens s’en éloignent, ils se projettent avec la construction d’une famille. Ce noyau se transforme en obsession pour le personnage de Neil qui imagine un mariage et un futur. Il tente de copier un modèle social typique de la société américaine. Celle-ci se présente également par le racisme et l’exclusion. Neil, à la bibliothèque, favorise l’accès d’un jeune noir à un livre sur Gauguin. Mais cela lui posera un problème et Neil, se voulant médiateur, découvre les deux aspects de la réalité. Encore une fois la peur est présente. Ce sentiment s’intègre peu à peu à la romance naissante et amplifie une fin attendue mais que Philip Roth laisse ouverte, telle une plaie que seul le temps pourra refermer.

Ce roman de Philip Roth, traduit par Céline Zins (et revu par Ada Savin), est publié en édition bilingue par Folio au prix de 11,40€.

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