Robilar ou le Maistre Chat, tome 3 – Fort Animo

Scénario de David Chauvel
Dessin de Sylvain Guinebaud
Couleur de Lou

Dans un royaume, on trouve un château dans lequel sont installés deux trônes pour le roi et son mari. Le chambellan, Robilar, un chat ingénieux à qui le royaume doit sa survie, se voit confier une nouvelle mission : ramener les animaux à la raison. Ils sont depuis en révolte et ont fait prisonniers le père Riflon et sa femme. Robilar découvre très vite l’ampleur de la situation et la difficulté de dialoguer avec ses congénères.

Voici le dernier tome de la trilogie conçue par David Chauvel Sylvain Guinebaud librement inspirée du Chat botté. Avec un plaisir communicatif, leur chat, Robilar, est plein d’ambition. Il veut manigancer et se jouer des situations. Dans les deux précédentes tomes, on percevait la supériorité de ce drôle d’animal sur les humains et son maître en particulier. Les autres animaux souvent rabaissés plus que de raison faisaient également preuve de malice et d’ingéniosité. Les histoires gardaient en leur cœur une bataille faite de roublardise et de faux semblants.

Ce troisième tome accentue encore plus cet angle en mettant en scène la révolte des animaux. Entre une référence à des classiques de George Orwell et un western (par le titre notamment), cette nouvelle histoire décortique toute la question de la place des animaux dans la société. Le cuisinier découvre la réalité de ces morceaux de chair qu’il cuisine. Son métier et son quotidien s’en trouvent complètement chamboulés, teintés d’un chagrin profond. Les animaux pointent toute la discrimination langagière des humains. Ainsi s’ouvre au cours d’assemblées générales de grandes discussions autour de cette attention à porter à ces semblables. Face à l’incompréhension d’un monde monolithique et hiérarchique, les animaux réfléchissent à une société mêlée d’idéal et de violence. Des années de soumission et des traumatismes ont facilité un déferlement de haine ouverte. David Chauvel s’amuse de ses situations pour montrer les impasses rencontrées et toute la difficulté d’un tel bouleversement. Sans forcément y poser un regard trop acide, l’auteur montre surtout la suprématie de la violence et de l’affirmation d’un pouvoir central sur tout ai de révolte. Dans ces dessins, Sylvain Guinebaud excelle dans son art de croquer les animaux, dessinant de véritables portraits grâce aux physionomie des animaux. Ils sont puissants, féroces et déterminés à lutter. On pense à la Révolution Française, à Braveheart, à tous ces moments d’insurrection à la finalité très incertaine. Justement les dernières pages témoignent d’un autre traumatisme, celui d’avoir vu une sincère cause balayée par l’aveuglement des plus forts.

On pourrait voir dans cette nouvelle intrigue le limites du personnage central. Robilar, ce chat voulant capter l’allure des humains, se retrouve entre sa nature et son désir, entre ces animaux en manque de respect et ses humains enviables mais tellement décevants. Le personnage est trituré par cet événement, ce qui permet aux auteurs de creuser un autre aspect de la palette de ce Maistre Chat.

Cette bande dessinée est publiée par Delcourt au prix de 15,50€.

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