Le Prince des Cravates

En revenant de son service militaire, Albert Sauvage reçoit l’invitation d’un lord anglais. Dans cette résidence londonienne, il rencontre la femme de lord Archibald, plus jeune que son mari. Cela le fait sortir de sa torpeur.

Des yeux verts, hésitants, très myopes et comme fatigués par les cils trop longs, des yeux gais et bons, un teint prodigieusement rose,  des cheveux d’un or changeant, une eurythmie de tous les mouvements,  une manière de s’habiller très personnelle, rare chez les anglaises, faisaient de cette femme un délicat objet d’art.

Cette nouvelle est réjouissante par la cruauté qu’elle déploie. Alors que les premières pages laissent penser à un marivaudage banal, le texte prend une tournure particulière à cause du sérieux de ses personnages. Chaque personnage joue très attentivement à ces rapports sociaux. Chaque pas, chaque geste est pensé. Albert est déterminé et réfléchi ne se laissant jamais aller à des facilités. Cette absence de sensibilité est renforcée par le style de l’auteur, par les précisions de ces descriptions qui installent une véritable distance. La fin est une sorte d’apothéose d’amertume qui nous en apprend beaucoup sur ces êtres de fiction. La narration est efficace par tout le mécanisme qu’elle décortique. L’avant-propos et les annexes permettent de mieux connaître Lucien Daudet, oublié entre les Lettres de mon moulin de son père et des propos fascistes de son frère. La mise en parallèle avec Marcel Proust est très intéressante car les points de rapprochement et de d’éloignement sont perceptibles.

Cette nouvelle est rééditée par La table ronde au prix de 5,90€.

Laisser un commentaire